Nous allons ici présenter les facteurs nous apparaissant comme déterminants pour assurer la réussite commerciale d’une offre « packagée » en matière d’OBO. Nous nous attarderons dans un premier temps sur le contenu avant d’évoquer le circuit commercial le plus approprié.
La structuration de l’Equity
Pour décliner une offre la plus « packagée » possible et donc la plus fluide à implémenter, il nous faut réduire au minimum les aléas liés au montage.
Le premier aléas, et sans doute le plus important, consiste à trouver un investisseur en capital en l’occurrence un fonds d’investissement. Or le processus est souvent long et la négociation sur les conditions est dure. De plus, dans le cadre de leurs due diligences, les fonds vont souvent demander à l’entreprise des éléments qu’elle n’a pas forcément à disposition (éléments comptables et financiers selon certaines normes, audit environnemental, outil de reporting précis …).
Par ailleurs, compte tenu des cibles que nous adressons en termes de valorisation, l’industrie du private equity ne sera pas forcément intéressée pour prendre des participations. En effet, les fonds doivent consacrer un temps incompressible à l’analyse des dossiers, à leur montage et enfin à leur suivi. S’ils veulent rentabiliser leur charges de structure (salaires des investisseurs, bureaux, due diligences, déplacements …) ils ont davantage intérêt à se concentrer sur des deals un peu plus importants en volume.
Enfin il y a tout un pan d’entreprises qui sont très matures et très rentables mais qui présentent un taux de croissance faible. Pour toutes ces entreprises, les perspectives de plus values ne sont pas au niveau attendu par les fonds d’investissements. En revanche, elles peuvent parfaitement faire l’objet d’un OBO.
Pour toutes ces raisons, nous pensons qu’il est pertinent de limiter l’offre « packagée » aux OBO purs ne faisant pas intervenir de fonds d’investissements.
La structuration de la dette
Comme nous l’avons illustré en 2.1.1, il existe de multiples sources de financements pour structurer la dette d’acquisition. Néanmoins, toutes ne sont pas utilisables dans le cadre de petites opérations.
Ainsi, nous éliminons d’emblée la dette obligataire recourant aux marchés financiers désintermédiés pour des raisons de faisabilité technique. Par ailleurs et pour les mêmes raisons qui nous ont conduit à écarter les fonds d’investissements dans la structuration de l’equity, nous écarterons les « mezzaneurs » de la structuration de la dette.
La dette d’acquisition sera donc essentiellement constituée par de la dette senior. Néanmoins compte tenu de la taille des opérations que nous adressons, il nous faudra faire une distinction entre les différentes tranches. Selon les entretiens que nous avons eus avec plusieurs organismes de financement (30) nous pouvons d’ores et déjà exclure les tranches C et D jugées comme trop risquées. A l’évidence, la tranche A – financement amortissable sur 7 ou 8 ans – recueille de loin la préférence des financeurs. Il y a deux raisons à cela, d’une part c’est la forme de financement la plus simple et la plus répandue, d’autre part c’est celle qui présente le plus de garanties pour la banque et donc le moins de risques. Néanmoins, dans certains cas, il pourrait être envisagé une fraction de tranche B – financement in fine sur 1 an de plus que la tranche A – afin de limiter le coût de la dette d’acquisition pendant la durée de l’opération.
Enfin, si la société cible dispose d’une trésorerie excédentaire et de bénéfices distribuables, nous pourrons mettre en place un prêt relais (financement très proche dans ses caractéristiques de la dette senior Tranche A) sur une durée courte afin de boucler le financement.
Une fois l’acquisition réalisée par la holding, la cible décidera le versement d’un dividende exceptionnel qui permettra à la holding de rembourser le prêt relais (cf. mécanisme de « Debt Push Down » évoqué en 2.1.2.2).
Ainsi, dans le cadre d’une offre « packagée » nous nous limiterons à la dette senior qui sera essentiellement composée de Tranche A avec dans certains cas de la Tranche B et / ou un prêt relais.
Comme dans toute démarche entrepreneuriale, une fois le marché identifié et l’offre construite, il est fondamental de réfléchir à la meilleure manière de la commercialiser. En effet, une offre qui procure seulement une satisfaction intellectuelle mais qui n’a pas d’applications concrètes n’a pas sa place dans une entreprise commerciale.
La technique la plus naturelle pour adresser le marché de manière systématique consisterait en une approche directe des dirigeants afin de leur présenter tous les avantages du schéma d’OBO. Néanmoins, notre pratique régulière des chefs d’entreprises nous démontre que ceux-ci sont très souvent sollicités par des consultants de toute sorte et sont donc assez méfiants par rapport aux propositions qui leur sont faites. Ainsi, si le montage paraît cohérent à l’entrepreneur, il consultera quasi systématiquement son expert comptable pour avoir son avis. En effet, dans de nombreux cas, les entrepreneurs sont liés à leur expert comptable depuis longtemps et ont développé avec eux une relation forte qui dans certains cas peut aller jusqu’à une amitié réelle. A ce stade l’expert comptable risque de se trouver dans une situation complexe à gérer. En effet, s’il confirme l’intérêt du montage à son client ce dernier risque de lui reprocher de ne pas le lui avoir proposé plus tôt. Dans tous les cas, il perdra en crédibilité aux yeux de son client. Ainsi, il préférera souvent l’immobilisme en appuyant sur la prétendue complexité du montage et sur les risques de l’opération (notamment le redressement fiscal) afin de ne pas perdre la face et éviter la question de sa pro activité. Dans ce cas, l’intermédiaire se trouverait en confrontation directe avec l’expert comptable et aurait donc peu de chances d’aboutir.
Pour contourner cet obstacle, il est préférable de procéder par une approche indirecte qui consiste à démarcher les experts comptables pour leur proposer un partenariat sur le montage d’opération d’OBO. Ce mode de fonctionnement présente des avantages multiples. En effet, en proposant à l’expert comptable une nouvelle source de chiffres d’affaires, l’intermédiaire aura moins de mal à obtenir un rendez-vous de partenariat avec lui qu’un rendez-vous commercial avec un entrepreneur. Par ailleurs, l’expert comptable comprendra vite les intérêts du montage car il dispose de la culture financière nécessaire et il pourra nous apporter des sociétés cibles clientes chez lui et qui ne sont pas répertoriées dans la base de données Diane. Enfin, d’une part l’expert comptable se sentira valorisé par le conseil qu’il apporte à son client et d’autre part, le dirigeant sera pleinement satisfait de l’attitude pro active de son interlocuteur. Ainsi, l’intermédiaire proposera une approche « gagnant / gagnant » et en ayant l’expert comptable de son coté il disposera d’un atout déterminant pour la réalisation de l’opération.
Naturellement, cette technique présente également des contraintes. En effet, plus la technique commerciale est indirecte, plus les frottements pour obtenir un prospect sont importants. Par ailleurs, il sera nécessaire de rémunérer les apporteurs d’affaires ce qui viendra éroder d’autant la marge de l’intermédiaire. Enfin, ce dernier devra veiller à préserver un savoir faire spécifique pour éviter de se faire court-circuiter par les expert comptables qui développent de plus en plus une activité de « Conseil en gestion privée ».
30. Entretiens physiques – Crédit Mutuel, Courtier Spécialisé.